« La connaissance s'accroît en la partageant. »
12 Mars 2018
Réalisé par Guillermo Del Toro, sorti le 21 février 2018
Avec Sally Hawkins, Doug Jones, Richard Jenkins, Michael Shannon, Octavia Spencer, Michael Stuhlbarg, Nick Searcy, David Hewlett...
"Modeste employée d’un laboratoire gouvernemental ultrasecret, Elisa (Sally Hawkins) mène une existence solitaire, d’autant plus isolée qu’elle est muette. Sa vie bascule à jamais lorsqu’elle et sa collègue Zelda (Octavia Spencer) découvrent une expérience encore plus secrète que les autres..."
Mon avis (passable) :
Quelques mots sur le film
Hommage assumé à L’Étrange Créature du lac noir de Jack Arnold, La Forme de l'eau est aussi un hommage (nettement moins assumé) au cinéma de Jean-Pierre Jeunet. Guillermo Del Toro a beau citer Terry Gilliam en référence majeure, il est impossible de ne pas voir l'étrange similarité entre ce film et l’univers et le style de Jeunet.
Que ce soit au niveau de la photographie aux tons verdâtres, de la musique à base d'accordéon diatonique, du look de l'héroïne candide très proche d'Amélie Poulain (jusqu'au voisin reclus qui peint et avec lequel elle entretient une relation quasi filiale)... L'introduction dans le cinéma aussi avec les yeux émerveillés de Sally Hawkins n'est pas sans rappeler une séquence similaire avec Audrey Tautou. On retrouve aussi la patte de Jeunet dans des emprunts manifeste à Delicatessen, comme le passage où les deux héros font danser leurs pieds assis devant un poste de télé diffusant une vieille comédie musicale en noir et blanc, ou la séquence de la salle de bain inondée, mis en scène de façon similaire.
Maintenant, que le film fasse de nombreux emprunts au cinéma de Jeunet ne le rend pas mauvais en soi, nombreux sont les réalisateurs à s’inspirer (plus ou moins ouvertement) les uns des autres (y compris Jeunet). Simplement, c’est ici un peu trop voyant et évident pour ne pas le mentionner. Alors que ces scènes dans le film de Del Toro sont plutôt réussies d’un point de vue purement graphique (Del Toro reste un remarquable artisan de l’image), je n’ai pas pu m’empêcher de voir un peu trop, ici ou là, la référence à Jeunet, et avoir du mal à m’immerger complètement auprès des deux héros de La Forme de l'eau. J'ai aussi pensé à Splash aussi, vieille comédie romantique un peu oubliée avec Tom Hanks et la "sirène" Daryl Hannah (mais je ne sais pas si c'est très flatteur vu que je crois avoir préféré le film de Ron Howard ^^).
Globalement, je n’ai d’ailleurs jamais tellement été impliqué par cette histoire d’amour extravagante entre le fils de L’Etrange créature du Lac Noir (et Abe Sapien de Hellboy), et la cousine autiste de Amélie Poulain. À aucun moment, cette histoire d’amour ne m’a parlé. Au-delà du côté chelou zoophile (bien plus glauque de le syndrome de Stockholm de La Belle et la Bête à mon avis ; vu que la Bête était vraiment un homme à la base, et non pas née ainsi) qui m’a paru plus ridicule que franchement choquant, c’est surtout que je n’en avais complètement rien à faire que Lézard-man se tape la vieille fille muette ou non. Surtout que je trouve leur romance trop rapide (ce coup de foudre quasi instantané pour un homme-poisson j'ai du mal à y croire), peu crédible (personne ne surveille le labo ou bien ?) et parfois même incompréhensible (dans le sens où j'ai eu du mal à saisir le cheminement sentimental de l'héroïne qui m'a semblé trop direct).
Heureusement, les seconds rôles du film s’avèrent nettement plus intéressants que les deux personnages principaux (ce qui est presque un comble dans une romance). Si j’ai l’impression que Octavia Spencer jouait encore l’éternel rôle de la mama noire au caractère bien trempé, j’ai pris plaisir à retrouver l’attachant Michael Stuhlbarg qui – ne me demandez pas pourquoi – m’a toujours rappelé la bonhommie candide de Robin Williams. Comme à son habitude, Michael Shannon campe à nouveau le méchant de service, mais il excelle tellement dans l’exercice que c’est un réel plaisir de le voir jouer les salopards ! Le rôle le plus intéressant à mes yeux restera quand même celui de Richard Jenkins – d’ailleurs nommé à l’Oscar – qui incarne ici les plus belles thématiques du film sur l’isolement, la vieillesse et l’intolérance. En une poignée de scènes, il vole complètement la vedette au couple vedette du long-métrage (le passage où il évoque son regret à être né trop tard ou peut-être trop tôt m’a beaucoup plu).
Au final, La Forme de l’eau méritait-il de recevoir l’Oscar du meilleur film ? Je ne le pense pas. Cette année, je l’aurais plus volontiers donné à Wind River (qui n’était même pas parmi les nommés) ou par défaut à 3 Billboards (imparfait mais qui m’aura quand même plus marqué grâce à ses personnages plus nuancés). Cela dit, je reste très content pour Guillermo Del Toro qui méritait d’être récompensé depuis au moins Le Labyrinthe de Pan – son chef-d’œuvre – et dont j’espère désormais pouvoir enfin se concrétiser l’arlésienne Les Montagnes Hallucinées que les fans de Lovecraft attendent avec une immense impatiente. Bon, par contre, l’Oscar de la meilleure musique pour Alexandre Desplat, au-delà du « Cocorico français ! », je reste septique. Elle n’est certes pas désagréable, mais elle n’a rien d’inoubliable non plus. Une heure après la séance, il m’était déjà impossible de me rappeler la moindre mélodie… On l’a connu plus inspiré, Del Toro aussi d’ailleurs. Mais je me réjouis pour eux malgré tout.
La critique vidéo :
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Mr Vladdy 16/08/2018 11:16
Shin 30/01/2019 11:58
Mr Vladdy 16/08/2018 11:15