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LA SHINÉMATHÈQUE

LA SHINÉMATHÈQUE

« La connaissance s'accroît en la partageant. »

Délires de traducteurs : in english malgré tout...

Comme je l'expliquais dans un précédent billet (visible en cliquant-ici), lorsque les distributeurs français ont trouvé une recette marketing qui fonctionne, ils ne l'abandonnent pas facilement. C'est ainsi que bon nombre de films étrangers ont eu le droit à des titres français étrangement similaires ; qu'il s'agisse d'escapades dans le désert, de coup de foudre à Amourland ou encore de facétieuses affaires de famille. Les exemples illustrant cette manie des distributeurs ne manquent vraiment pas, l'exhaustivité en la matière semblant même particulièrement difficile. Néanmoins, je vous propose d'évoquer aujourd'hui les deux catégories qui me paraissent particulièrement éloquentes pour illustrer l'art (délicat) de la traduction...


When Willie comes marching homePour commencer, il convient de citer le champion incontesté de la discipline. Depuis des années, la préposition "malgré" (lui, elle, eux, moi... plus tous ceux qui sont seuls !) a effectivement été utilisée maintes fois (bien souvent à tort et à travers) par les distributeurs français. Dès les années 1950, When Willie comes marching home (1950) de John Ford devient donc L'Embusqué ou parfois aussi le Planqué, mais toujours – malgré lui ; tandis que Jumping Jacks (1952) de Norman Taurog est remplacé par le cocasse Parachutiste malgré lui ; et que The Tunnel of love (1958) de Gene Kelly se voit transformé en un nettement plus terre-à-terre Père malgré lui. Par la suite, l'exotique The Road to Hong Kong (1962) de Norman Panama aura le droit à  un plus lointain Astronautes malgré eux ; alors que le classieux Support your local gunfighter (1971) de Burt Kennedy sera simplifié en un radical Tueur malgré lui. Quant au dramatique Critical condition (1987) de Michael Apted, il sera à son tour changé en un nettement plus léger Toubib malgré lui.

It could happen to youLes décennies suivantes n'épargneront pas non plus les traductions de titres étrangers. Ainsi, le Hero (1992) de Stephen Frears ira jusqu'à être un Héros malgré lui ; pendant que le prometteur It could happen to you (1994) d'Andrew Bergman s'intéressera plutôt à un Milliardaire malgré lui ; que le Dear God (1996) de Garry Marshall sera miraculeusement devenu un Escroc malgré lui ;  et que les Hoods (1998) de Mark Malone seront réduits à un simple Parrain malgré lui.  Loin de s'atténuer, la tendance semble  même s'être largement accrue au cours des dernières années. Une fois encore, le choix vaste et il y a fort à parier que d'autres traductions françaises pourraient tout autant mettre en évidence l'emploi abusif de la préposition "malgré". Le but n'étant pas non plus de vous assommer sous une multitude d'exemple, je me contenterai donc de mentionner ceux qui me semblent le plus représentatifs.

Mean GirlsPour commencer, si The Princess diaries (2001) de Garry Marshal continue à parler de princesse, celle-ci devient une Princesse malgré elle en traversant l'Atlantique. Parallèlement, les Mean Girls (2003) de Mark Waters ne s'intéresse plus qu'à la seule Lolita malgré moi incarnée par Lindsay Lohan. Du côté des suites, celle de Deuce Bigalow – un Gigolo à tout prix chez nous ; dérive évidente popularisée par le fameux Mary à tout prix) – aura également le droit à un changement similaire ; Deuce Bigalow : European Gigolo (2004) de Mike Bigelow se métamorphosant alors en un  Gigolo malgré lui. Pas davantage épargnés non plus, les films d'animation connaîtront aussi ce traitement de faveur. Ainsi, The Ant Bully (2005) de John A. Davis devient à son tour Lucas, fourmi malgré lui ; tandis que Bolt (2008) de Chris Williams et Byron Howard ne se contente plus d'évoquer le nom de son héros, mais se résume plutôt en un Volt, star malgré lui. Dernière exemple en date, le Step brothers (2008) d'Adam McKay où les demi-frères apprendront alors surtout à être des Frangins malgré eux.

Support your local gunfighterStep brothers

 
City of industryEnfin, alors qu'on pensait les distributeurs à court d'idées neuves pour habiller les affiches françaises, ceux-ci ont alors réalisé l'exploit d'inventer le concept ultime : remplacer un titre anglais par... un autre titre anglais ! Les voies de la "traduction" sont parfois impénétrables... Si The Blast of Silence (1961) d'Allen Baron avait déjà été rebaptisé Baby boy Frankie, Armor Of God (1987) de Jackie Chan changé en  Mister Dynamite ; le probablement trop pointu City of industry (1997) de John Irvin transformé en un nettement plus limpide City of crime ; l'enfantin Never been kissed (1998) de Raja Gosnell métamorphosé en un mièvre College attitude ; ou enfin le fameux Runaway bride (1999) de Garry Marshall en un bien étrange franglais Just married (ou presque) ; on remarque que la méthode s'est surtout développée ces dernières années. Une autre conséquence du bug de l'an 2000 peut-être ?

Take the leadSoucieux du détail qui tue,  les distributeurs renomment donc la comédie romantique Down with love (2002) de Peyton Reed avec Ewan McGregor et Renée Zellweger en Bye Bye love ; le thriller téléphonique Phone Booth (2002) de Joel Schumacher en Phone Game ; le délire asiatique Kung-Fu Hustle (2004) de Stephen Chow en Crazy Kung-Fu ; ou encore le polar volcanique Harsh times (2005) de David Ayer en Bad times. Surnommé The Pacifier (2004) dans le film éponyme d'Adam Shankman, Vin Diesel deviendra ensuite le Baby-sittor en traversant la frontière française. On peut également citer Rebound (2004) de Steve Carr connu chez nous sous le titre Basket Academy ; Take the lead (2005) de Liz Friedlander avec Antonio Banderas plus fameux en tant que Dance with me ; A prairie home companion (2006) de Robert Altman que l'on célèbre plutôt comme The Last show ; ou encore The Guardian (2006) d'Andrew Davis qui fera carrière dans l'hexagone en tant que Coast Guards. Dernièrement, The Boat that rocked (2009) de Richard Curtis a également laissé tombé son bateau qui rockait pour devenir un plus familier Good Morning England.

Cruel intentionsUne variante sexy de cette méthoque existe aussi. Ainsi peut-on citer La Muerte de Mikel (1986) d'Imanol Uribe, devenu un bien plus racoleur Le Sexe du Diable ; Wild Things (1997) de John McNaughton métamorphosé en un plus torride Sexcrimes ; Cruel Intentions (1998) de Roger Kumble et son indispensable traduction hexagonale Sexe Intentions ; Denial (1998) d'Adam Rifkin d'abord vendu comme un connoté All about sex , et finalement commercialé dans la version française de sa traduction (vous suivez toujours ?) Tout sur le sexe ; Body shots (1999) de Michael Cristofer pas encore assez chaud en l'espèce et donc changé en un plus explicite Sexe attitudes ; ou encore The In Crowd (2000) de Mary Lambert qui devint à son tour Sex & manipulations. L'année qui suit inspire décidemment les distributeurs puisque le parodique Not another teen movie (2001) de Joel Gallen devient Sex Academy ; l'hivernal Out cold (2001) d'Emmett & Brendan Malloy se change en Snow, sex & sun ; le nostalgique The Banger Sisters (2001) de Bob Dolman prend à son tour une déclinaison franglaise Sex fans des sixties ; et le sensuel Tangled (2001) de Jay Lowi se métamorphose en Sex troubles. Dans la foulée, Step up (2002) d'Anne Fletcher sera également transformé en Sexy dance

Make it happenBâtis sur le même concept, les titres exploitants la gente féminine ne sont pas rares non plus. C'est pourquoi on peut trouver un Bring it on (2000) de Peyton Reed changé en American Girls ; un Coyote Ugly (2000) de David McNally transcendé en Coyote Girls ; On the outs (2004) de Lori Silverbush et Michael Skolnik troqué par des Girls in America ; Just my luck (2005) de Donald Petrie métamorphosé en Lucky Girl ; ou encore Make it happen (2007) de Darren Grant devenu un plus torride Dancing Girls. Le meilleur exemple reste tout de même le film Mädchen, Mädchen ! (2001) de l'allemand Dennis Gansel qui cumule à la fois Girls & Sex.

Pour finir, on peut également mentionner les multiples déclinaisons autour du nom "Movie" sur lesquelles je ne m'attarderai pas davantage : Don't be a menace to South Central while drinking your juice in the Hood (Spoof movie, 1996), Shriek if you know what I did last friday the thirteenth (Scary scream movie, 2000), Date movie (Sexy movie, 2006), Epic movie (Big movie, 2007), Bachelor Party 2 : The Last Temptation (Strip movie, 2008), Dance flick (Dance movie, 2009)...

Wild thingsMädchen, Mädchen !


To be continued...

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G
Salut shin =) Ca t'en fait deux maintenant ! :DQuel est la prochaine étape ? Mélangé les traductions ? "sex movie malgré lui", "Coup de foudre malgé lui" ? :DBye
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K
Pertinent, et on ne peut plus vrai finalement. Bien Vu !
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S
<br /> <br /> Bonjour kschoice,<br /> <br /> Tant bien même je n'ai eu qu'un seul commentaire, je vais arbitrairement décider que cette rubrique plaît et je vais donc me pencher sur un prochain billet pour la compléter ! <br /> <br /> Diaboliquement,<br /> <br /> Shin.<br /> <br /> <br /> <br />