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LA SHINÉMATHÈQUE

LA SHINÉMATHÈQUE

« La connaissance s'accroît en la partageant. »

Sans issue

Sans issueRéalisé par Mabrouk El Mechri, sorti le 2 mai 2012
Titre original : The Cold light of day 

Avec Henry Cavill, Sigourney Weaver, Bruce Willis, Verónica Echegui, Roschdy Zem, Joseph Mawle, Caroline Goodall, Alex Amaral  ...

"Will Shaw (Henry Cavill), un étudiant américain, part en Espagne rejoindre sa famille pour une croisière pendant les vacances. Mais à son arrivée, il découvre un bateau vide et des traces de sang. Il est contacté par une mystérieuse organisation qui lui apprend que son père (Bruce Willis) est en réalité un agent de la CIA. Celui-ci a disparu avec des documents importants. Will dispose de quelques jours pour le retrouver s’il veut sauver le reste de sa famille..."




Mon avis
(pas terrible) :





 Après s'être d'abord fait remarqué en 2005 avec son premier long-métrage, Virgil, Mabrouk El Merchi a connu une belle consécration avec le surprenant JCVD. Témoignage introspectif aussi touchant par sa sincérité qu'efficace par sa maîtrise technique et son sens du tempo, le long-métrage du français était surtout parvenu à prouver à tous s'il le fallait que, indéniablement, Jean-Claude Van Damme est un véritable acteur qui vaut bien mieux que la triste réputation de martial performer un brin allumé qui lui colle encore à la peau. Après avoir réussi haut la main ce "pari" que l'on pensait casse-gueule au possible, le frenchy a décidé, comme bon nombre d'autres avant lui, de tenter l'aventure américaine. Si ce choix semble tout à fait logique et compréhensible (Hollywood, cette fabrique à rêves de tous cinéphiles, étant la promesse d'un budget et d'une exposition nettement plus conséquentes), il est aussi particulièrement risqué. En effet, bon nombre d'autres avant lui l'ont très vite amèrement regretté. À Hollywood en effet, les studios ne pardonnent pas le faux pas (comprenez : le bide commercial) et la pression qu'ils exercent sur les réalisateurs étrangers "exilés" en est le parfait reflet (comprenez : il faut souvent accepter de ne pas être le seul commandant à bord) ; même un réalisateur aussi aguerri et insoumis que Mathieu Kassovitz a eu toutes les peines du monde à imposer son point de vue tant les contraintes (émanant autant de la part des producteurs, des scénaristes, que des acteurs) y sont là bas pesantes. Pour un réalisateur, aller tourner aux États-Unis, c'est en quelque sorte un peu faire son baptême du feu. Malheureusement, il semblerait que Malbrouk El Mechri s'y soit en l'occurrence bel et bien brûlé les ailes lui-aussi.

 

Sans issue est en effet ce qu'on appelle un ratage dans les grandes largeurs. Doté d'un scénario indigent qui n'évite jamais le ridicule et l'absurde, le premier film américain du frenchy ne brille pas non plus par son originalité. L'histoire a déjà été vu mille fois (celle du pauvre type lambda, au mauvais endroit au mauvais moment, qui doit faire face à un vaste complot élaboré par d'obscures organisations secrètes). Cependant, là où un Tony Scott ou un Richard Donner auraient su malicieusement contourner le problème en nous offrant un solide actionner movie conscient de ses propres limites mais qui ne sacrifierait jamais sa crédibilité (aussi extrême soit le spectacle présenté), le film de Mabrouk El Mechri dépasse lui bien souvent les limites du tangible et du possible (le fameux "possimpossible" où même l'impossible devient possible ! *rires*) et enchaîne sans vergogne les invraisemblances grotesques et les raccourcis les plus grossiers. On ne s'étonnera donc pas de voir notre héros, soi-disant un quidam, réussir du premier coup les exploits et cascades les plus improbables (comme par exemple une chute libre du dixième étage suspendu à un fil électrique d'où il sort totalement indemne...), ou faire preuve d'une adresse au tir qui frise l'insolence (en même temps, les méchants du film sont de vrais veaux mentalement déficients). Lorgnant visiblement vers le cahier des charges d'une production Besson (mais sans le côté divertissement décomplexé et la recherche de l'absolue efficacité), Sans issue n'est pas seulement un Jason Bourne du pauvre enchaînant de crétines séquences d'action mais aussi un fourre-tout scénaristique invraisemblable qui accumule une quantité astronomique de retournements de situations stupides (notamment concernant les motivations, pas très claires, des méchants de l'histoire). 

 

Sans issue
Ceci est une publicité mensongère.

 

Dans cet immense bourbier incroyablement foutraque, les acteurs font donc ce qu'ils peuvent pour faire exister des personnages creux et à la caractérisation minimaliste. Commençons d'abord pour le sujet qui fâche : Bruce Willis. En effet, même si le procédé n'est pas rare, indiquer en gros sur l'affiche le nom de l'interprète de John McClane et lui donner la part belle dans la bande-annonce alors qu'il a une durée de présence à l'écran n'excédant pas le quart d'heure (dont dix bonnes minutes à manger des côtelettes ou piloter un voilier), c'est se foutre légèrement de la gueule du spectateur. D'autant plus dommage que les précédentes collaborations de l'acteur américain avec un réalisateur français avaient plutôt bien fonctionnées ; tant chez Luc Besson avec son mémorable Le Cinquième Élement qu'avec le très efficace Otage de Florent-Emilio Siri . Le personnage de Bruce Willis étant expédié après une malheureuse scène de baston un brin burnée (l'une des rares qui vaillent la peine d'ailleurs), c'est donc à Henry Cavill – Thésée héroïque des Immortels de Tarsem Singh et futur Kal-El superhéroïque du Superman de Zack Snyder que revient la lourde tâche de porter le film sur ses pas si frêles épaules et sa mâchoire carrée. Même s'il n'est ridicule non plus dans ce rôle de chef (par défaut) de famille énervé, quand tu passes derrière Bruce Willis et que tu fais face à une salle de spectateurs frustrés (surtout venus voir le dit Bruce Willis), t'as quand même toutes les chances de te planter bien comme il faut. Cela dit, la frustration atteint surtout son paroxysme avec le personnage incarné par une Sigourney Weaver raide comme un piquet en plein délit de cachetonnage (étonnant d'ailleurs quand on connait les capacités de l'actrice).

 

Pourtant, ici ou là, quelques belles idées de mise en scène nous démontre qu'on n'a pas affaire un vulgaire yes-man et qu'un vrai réalisateur est aux commandes comme en témoignent quelques champs-contrechamps inventifs où la caméra s'éclipse astucieusement, ces très beaux effets de caméra tournant autour des personnages et une utilisation inspirée des jeux de miroir. Mais cela ne suffit pas et, dès que le montage devient omniprésent, le sur-découpage intempestif des scènes vient gâcher tout les efforts d'un réalisateur nettement plus à l'aise lorsqu'il dispose de plus d'une seconde et demi par plan pour exposer une idée (qu'on se rappelle les formidables plans-séquences de son brillant JCVD pour s'en convaincre). À ce titre, la scène de gunfights dans le parking est un grand moment de nimportenawak où l'on ne comprend absolument rien tant le montage est approximatif et dénué de toute logique. Sans issue ne jouant pas non plus la carte du second degré assumé (il est au contraire d'un sérieux papal embarrassant tant ce qu'on nous montre à l'écran est risible), on ne peut même pas non plus s'en amuser comme on le ferait devant un bon vieux nanar du samedi soir. Dommage. Il ne reste alors plus que le tournage en Espagne, dont l'ambiance solaire et la beauté des paysages sont toujours aussi agréables, d'autant que les filles y sont plutôt jolies (à l'image de l'actrice qui aide le héros avec son petit air de Natalie Portman en plus sexy), pour nous procurer un petit plaisir visuel en guise de maigre compensation. C'est quand même très léger et, finalement, on n'est bien content que Bruce Willis ne se compromette pas plus d'une poignée de minutes dans cet immense gâchis...

 

 

Pour voir d'autres chroniques de films : cliquez-ici

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Commenter cet article

S
<br /> Est-ce qu’il est bien comme thriller ? Hâte de voir Henry Cavill en pleine action dans le reboot de Superman !<br />
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S
<br /> <br /> Euh... Non. Comme je le précise dans mon avis, je ne conseille pas ce film.<br /> <br /> J'attends beaucoup la version de Zack Snyder du mythe de Superman en revanche !<br /> <br /> <br /> <br />
W
<br /> On pouvait sentir la daube de série Z à plein nez. <br />
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S
<br /> <br /> C'est pas faux. Mais j'ai voulu croire au réalisateur et j'adore Bruce Willis !<br /> <br /> Malheureusement...<br /> <br /> <br /> <br />
V
<br /> Bien content de te relire !<br />
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L
<br /> Oui, j'adore Bruce Willis et Sigourney Weaver mais je sais pas, la bande annonce ne m'emballait pas trop. On n'a l'impression d'un "taken" peu inspiré. J'ai préféré voir "la cabane dans les bois"<br /> sur grand écran et d'après ta critique, j'ai bien fait.<br />
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M
<br /> Bon ben du coup celui là je ne vais pas me presser pour le voir. Ca sera si j'ai le temps et l'envie soudaine :P<br />
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