19 Juin 2013
Pour être tout à fait honnête, je reconnais sans détour que, entre Sofia Coppola et moi, ça a rarement été le grand amour ; les travaux de la fille du grand Francis Ford ne m'ayant jamais tout à fait convaincus. Après m'être déjà passablement ennuyé devant son Virgin Suicides (le fait que je ne puisse absolument pas blairer Kirsten Dunst n'aidant évidemment pas à apprécier le film), puis avoir également dû lutter contre le sommeil à plusieurs reprises devant son insignifiante fable bobo semi-autobiographique Somewhere, je dois cependant bien admettre que, si j'avais soigneusement fait en sorte de "rater" son Marie-Antoinette (insupportable dès les premières secondes de sa bande-annonce), j'avais en revanche plutôt bien accroché avec son Lost in Translation (seul long-métrage de sa filmographie que je considère donc, à ce jour, comme une réussite notable). N'étant donc pas complètement allergique à la réalisatrice, et me réjouissant déjà de la perspective que l'insupportable Kirsten Dunst ne fasse pas partie de l'aventure (elle apparaîtra finalement, mais juste pour quelques courts instants), j'envisageais déjà ce The Bling Ring avec une certaine confiance. D'une part, parce que la réalisatrice connaît bien le sujet (elle est, pour ainsi dire, baignée dans cette univers de strass et paillettes depuis sa naissance). D'autre part, parce que j'étais extrêmement curieux de découvrir (comme beaucoup je pense) Emma Watson dans un rôle annoncé comme étant aux antipodes de celui qui la fit connaître via la célébrissime saga Harry Potter. Malheureusement, si le cinéma de Sofia Coppola n'est pas bien énergique à la base, elle a ici battu des records absolus de chiantitude.
Car – hormis les premières minutes qui présentent (brièvement) la rencontre entre la meneuse d'un groupe de filles friquées et un loser un peu paumé, et la (très) rapide conclusion sur le procès de ces jeunes – The Bling Ring ne raconte absolument RIEN et ne fait que tourner en boucle. Au bout d'un quart d'heure, le film s'enfonce en effet dans un atroce schéma répétitif consistant à alterner un cambriolage, une soirée en discothèque et de deux-trois lignes de dialogue creux entre les personnages. Et l'interminable heure qui suit (les 95 minutes du film semblent bien durer une bonne demi-heure de plus) ne fera que reproduire jusqu'à l'épuisement (du spectateur) le même enchaînement de scènes. Et d'ailleurs, on se demande encore le véritable but recherché de l'entreprise. Le long-métrage de Sofia Coppola ne développe absolument aucune piste nous permettant de comprendre ces jeunes, ni pourquoi ils font ce qu'ils font. On devine évidemment qu'il y a sans doute quelque rapport avec le désœuvrement d'une jeunesse dorée totalement obsédée par le culte de l'image et qui ne sait plus vraiment comment pimenter la futilité déprimante de son quotidien. Mais la réalisatrice porte un regard bien trop contemplatif – distancié même – pour que l'on puisse être un tant soit peu touché – ou du moins, intéressé – par le sort de ces individus totalement superficiels et dont la vacuité permanente ne permet aucune identification possible. Car franchement, les turpitudes de ces gosses de riches issus de la haute bourgeoisie californienne, dont le seul but dans l'existence semble être de vivre la vie luxueuse de starlettes pathétiques aussi vides qu'eux, au final, on ne s'en tamponnerait quand même pas un peu royalement le coquillard sans déconner ?
Ce qui est d'autant plus ironique lorsque l'on sait que ces fameuses It Girls vénérées par la bande – Paris Hilton, Kim Kardashian, Lindsey Lohan, etc. – doivent leur renommée médiatique quand même largement plus à leurs frasques intimes (de la mini-jupe sans culotte jusqu'à la sextape) qu'à leurs compétences professionnelles (si tant est qu'elles en aient vraiment). Au lieu de cela, la réalisatrice se laisse piéger par son côté fashion victim et s'enfonce dans une démarche assez curieuse consistant à systématiquement mettre en valeur les signes extérieurs de richesse en multipliant les plans admiratifs sur les vêtements de luxe et autres somptueuses chaussures hors de prix ; alors même que cette glorification constante des marques (ouvertement citées) me semble être à l'exact opposé de cette superficialité outrancière dont le film était précisément supposé souligner l'absurdité. Et si je me doutais bien que le résultat n'aurait pas la virulence rentre-dedans d'un Larry Clark, ni même la mélancolie trash de la formidable série Skins, j'aurais toutefois apprécié que The Bling Ring ne s'apparente pas autant à un truc aussi futile que ces reportages télévisés interchangeables façon Enquête Exclusive. Enrobant des personnages creux et insipides autour d'une mise en scène volontairement minimaliste (si ce n'est un plan-séquence zoomé vaguement intéressant) et d'un montage totalement à l'ouest (les très bons morceaux de sa bande originale étant systématiquement coupés au mauvais moment ; Quentin Tarantino aurait dû lui donner des cours sur le sujet lorsqu'ils étaient ensemble), Sofia Coppola livre donc ici un produit aussi vain sur la forme que sur le fond. Il se passe d'ailleurs si peu de choses que The Bling Ring s'oublie presque instantanément en sortant de la salle. Du reste, si je n'avais pas pris soin de noter avec précision mon ressenti juste après la séance, je n'aurais pas eu grand chose à en dire ; si ce n'est que c'était chiant et que Emma Watson est devenue magnifique.
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